Ne sous-estimez pas le CÉLI!

30 novembre 2008

Un lecteur de CELI.ca, a réalisé une brillante analyse du compte d’épargne libre d’impôt. Je suis très heureux de vous présenter ici le fruit des recherches de l’ingénieur Jacques Bourdeau.

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Le CELI : un changement plus important que la majorité ne veut le croire

Le CELI est certainement l’un des sujets de réflexion et de discussion à la mode ces jours-ci. Depuis l’annonce de sa création par le gouvernement fédéral et la confirmation du gouvernement provincial de l’implanter aussi, le CELI en a fait jaser plusieurs. Si plusieurs réponses sont disponibles, l’avis le plus fréquent est le suivant :

  • Cotiser à un CELI : Oui, mais seulement après avoir épuisé ses droits de cotisation REER.

Est-ce la bonne réponse ou est-ce la réponse de la nature humaine toujours résistante au changement ?

Hypothèses

Si l’argent ne fait pas le bonheur, l’argent ne fait pas la richesse non plus. En effet, des célébrités gagnant des millions de dollars par année trouvent les moyens de faire faillite. Ainsi, la présente analyse débute par l’hypothèse que, peu importe les revenus dont dispose chacun, ces revenus sont utilisés selon un budget cohérent et approprié. Sans une telle hypothèse, la seule réponse possible est de renvoyer chacun à cette première étape essentielle qu’est le budget.

La seconde hypothèse est le nombre d’années avant la retraite. En effet, si une personne débute sa retraite rapidement, le CELI n’aura pas eu le temps de prendre une valeur significative pour jouer un rôle majeur. Ainsi, la présente analyse considère qu’il y aura au moins 15 ans de revenus avant le début de la retraite. Sans cette seconde hypothèse, les bienfaits du CELI demeurent, mais à une échelle si faible qu’ils seront à peine perceptibles.

Avez-vous les moyens d’épargner 5000$ par année

Lors de son émission à Radio-Canada, M. Maisonneuve se pose une question pertinente pour orienter l’analyse du CELI : Avez-vous les moyens d’épargner 5000$ par année ? Une analyse complète doit considérer les deux cas de figure. Tous les budgets équilibrés permettent une épargne quelconque. Cependant, ce ne sont pas tous les budgets qui offrent l’épargne requise de 95$ par semaine pour accumuler les 5000$ permis annuellement dans le CELI.

Le budget ne peut épargner une telle somme

5000$, c’est à la fois beaucoup d’argent et peu. Cela constitue une somme importante et difficile à accumuler, mais se révèle vite épuisée en cas d’imprévu : perte d’emploi, sinistre, réparation majeure, etc. Si un budget ne permet pas d’accumuler 5000$ par année, l’épargne qu’il offre doit rester accessible pour servir en cas d’urgence. Pour cette situation, le CELI est la seule option.

Si l’argent est placé dans un REER, il ne sera pas récupérable en entier. S’il sera possible de retirer la somme, celle-ci augmentera les revenus. Cette augmentation a toutes les chances de faire augmenter le taux d’imposition car, le budget ne pouvant épargner beaucoup, le revenu total est dans les premières tranches d’imposition. L’argent est donc dé-imposé à faible taux pour être ré-imposé à plus fort taux : le contraire total de l’esprit du REER et une perte financière directe. Le retour d’impôt fourni par le REER n’aide pas non plus.

En effet, ce retour sera faible car le revenu de base est dans les premières tranches d’impôt. Le montant investi étant faible lui aussi, une petite fraction d’un petit montant ne laisse pas grand chose. L’épargnant qui ne peut engranger plus de 5000$ par année doit donc placer cet argent dans un CELI plutôt qu’un REER pour plusieurs raisons :

  • Il a besoin de l’accès à cet argent en cas d’urgence au moins (peut-être d’autres plans aussi)

  • Son taux d’imposition étant déjà faible, il est peu probable qu’il puisse sortir l’argent de son REER à un taux encore moindre; au contraire, il risque fortement de le sortir à taux supérieur.

  • Au moment de la retraite, l’argent provenant du CELI n’est pas un revenu. L’épargnant a donc droit au maximum d’aide financière des différents programmes : RRQ, crédits d’impôts, etc.

Cet épargnant ne parviendra pas à maximiser son CELI et ainsi, n’aura pas besoin d’un autre véhicule. Ses CPG, comptes d’épargnes et autres pourront tous être enregistrés dans le CELI et ce sera là qu’il sera le mieux servi.

Le budget peut épargner plus de 5000$

Si le CELI est le seul véhicule à utiliser pour celui qui a peu de moyens d’épargner, est-ce le cas aussi pour celui qui peut épargner davantage, par exemple 9000$ ? La réponse est non puisque le CELI ne pourra contenir et protéger une telle somme. Cependant, qui est à privilégier : le CELI ou le REER ? La vieille garde a répondu le REER. C’était lui le roi de l’épargne retraite hier, ce sera donc lui le roi demain aussi. Est-ce effectivement le cas ou si le CELI ne vient pas de détrôner son prédécesseur ?

Épuiser ses droits de cotisation REER est quelque peu utopique. En effet, avec la possibilité de mettre 18% de ses revenus dans le REER et un maximum de 21 000$, il faut gagner la loterie pour épuiser une telle capacité. Pour s’en convaincre, il suffit de penser que le taux d’épargne recommandé est 10% plutôt que 18, et il est presque nul actuellement. Ainsi, épuiser ses droits de cotisation REER est impossible pour plusieurs. Est-ce que cela signifie que le CELI n’est pas pour eux ? Certainement pas.

D’une part, pour eux comme pour les petits épargnants, le CELI est le véhicule parfait pour l’épargne en cas d’urgence. D’autre part, le CELI a un effet multiplicateur sur le REER et c’est pourquoi il doit être utilisé au maximum.

Le but du REER est de minimiser le taux d’imposition en le rendant moindre à la retraite qu’il ne l’était lors de l’épargne. Si tout l’argent s’y trouve, une tranche significative du REER sera retirée au même taux qu’elle a été dé-imposée. Le REER sera donc resté sans effet pour cette partie. Un autre facteur est le besoin de revenus irréguliers pendant la retraite. Les voyages sont un bel exemple.

Sur 20 ans de retraite, une personne souhaite avoir les moyens de faire un voyage par année. Cependant, avec l’âge, les voyages sont de plus en plus difficiles et personne ne sait exactement quand son heure viendra. Pour ces deux raisons, il est plus intéressant de faire 2 voyages par année pendant 5 ans, un voyage par année pendant 5 autres années et un voyage par 2 ans pour le reste. Les voyages auront été faits au meilleur de la forme et, si l’heure sonne plus tôt que prévu, chacun aura profité de ses moyens au maximum. En terme fiscal, cela signifie cependant un revenu asymétrique, beaucoup plus élevé au début qu’à la fin.

En misant tout dans le REER, cela assure qu’un maximum d’argent sera imposé à un taux maximum, toujours contre le principe de base du REER. En disposant plutôt d’un maximum en CELI, ce dernier peut offrir le revenu asymétrique recherché sans pénalité. Aussi, même s’il est utilisé de façon symétrique, il réduit le seuil de revenu, garantissant qu’une plus large part du REER sera effectivement ré-imposée à taux moindre.

Ainsi, selon cette logique, l’épargnant disposant de 9000$ devrait donc en mettre 5000$ dans le CELI et 4000$ dans le REER ? Non, car ainsi, il n’atteindrait qu’un seul objectif : maximiser le CELI. Il lui faut aussi maximiser son capital. En considérant que la personne a un taux d’imposition de 33%, cela laisserait 4000$ dans le REER, 5000$ dans le CELI et 1 333$ non enregistré. L’argent ne pourra être enregistré que l’année suivante et le second retour d’impôt arrivera un an trop tard.

Toujours selon un taux d’imposition de 33%, la personne devrait mettre 6000$ dans son REER, 3000$ dans son CELI et compléter son CELI avec le retour d’impôt de 2000$. Cela donne un capital supérieur et complètement enregistré dès la première année.

Conclusion

En maximisant le CELI, cet épargnant se procure tous les avantages :

  • Accès à une somme d’argent en cas d’urgence;

  • Possibilité de revenus asymétriques à la retraite, sans pénalité d’impôt;

  • Garantie d’un taux d’imposition moindre pour les sommes prises dans le REER, maximisant son effet;

  • Revenu brut moindre facilitant les crédits d’impôts, l’aide au revenu et autres

S’il suivait les conseils de la vieille garde et maximisait son REER à la place, sa situation serait différente :

  • Taux d’imposition maximum pour sortir de l’argent du REER en cas d’urgence

  • Taux d’imposition maximum pour sortir de l’argent du REER de façon asymétrique

  • Taux d’imposition supérieur sur une tranche du REER sortie comme seul revenu

  • Revenu brut maximum, limitant les autres entrées d’argent

Ainsi, peu importe la capacité d’épargner de chacun, le CELI a effectivement détrôné le REER comme véhicule de planification de retraite : maximiser le CELI est plus important que maximiser le REER. S’il est impossible d’atteindre le maximum du CELI, ce dernier suffit. Si le CELI ne peut contenir toute l’épargne retraite, le supplément ira dans le REER.

Jacques Bourdeau, ing. Lasalle, Qc

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Par Fabien Major

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