FNB: Le syndrome du plus bas soumissionnaire

20 février 2013
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Depuis 2 ou 3 ans, les médias n’en ont que pour les frais de gestion des produits de placement. On tente de faire des rapprochements entre l’un des plus grands marchés financiers au monde et le Canada. Difficile d’avoir une industrie des services financiers comparable quand notre population est de 35 millions de personnes et nos valeurs de marchés des parts cotées en bourse sont de 1 907 milliards $ vs 314 millions d’habitants et 15 640 milliards $ de valeurs boursières pour les États-Unis.

Les publicités et la couverture médiatique aidant, les fonds négociés en bourse (FNB) ont pris un essor considérable et atteignent maintenant 56 milliards en actifs totaux au Canada. L’attention du public est maintenant tournée uniquement sur les frais financiers. Il serait peut-être sage de rappeler que c’est le rendement total et final qui influencera votre plan de retraite.

De produit marginal, utilisé à l’occasion par les gestionnaires de fonds de pension ou par les assureurs qui souhaitaient exposer une partie de leurs portefeuilles à un secteur économique ou géographique, les FNB (ou ETF en anglais) sont devenus LES produits financiers les plus «tendance». Une mode. Comme celle d’investir dans la techno en 1999 ou dans l’immobilier en 2007.

Au zénith de ces précédentes bulles, l’investisseur, l’épargnant et le spéculateur dansaient tous au rythme des rendements. 10% étaient parfois le rendement obtenu dans un seul mois.  On n’avait des yeux que pour les gains «double digits». Idéalement au-dessus de 50% par année. Après les corrections et krachs de marchés en 2008, les investisseurs sont revenus sur les parquets, mais sur la pointe des pieds.

Si autrefois, on n’en avait que pour les gros rendements, maintenant on n‘y croit plus. Alors, on ne s’occupe QUE des frais de gestion. L’attention est passée d’un bout à l’autre du produit finalement. Mais, curieusement on ne trouve pas beaucoup d’échos pour répondre aux questions: Qu’obtenez-vous en retour de vos faibles frais de gestion? Quel plan devez-vous suivre? Qui adaptera la stratégie aux marchés changeants? Que fait-on pour amoindrir l’impact fiscal?

Bienvenue dans l’ère du «Do-it-Yourself» de la finance. Les médias de masse nous ont appris à faire nous-mêmes nos sushis, à assembler nous-mêmes notre cinéma-maison, à nous automédicamenter, à finir notre sous-sol, à nous gosser des armoires de cuisine… et à faire nos transactions immobilières. Maintenant on se bricole nos propres fonds de retraite! Quel beau passe-temps.

VIVE LES EXTRAS

ikea-shitAu moment où s’ouvrent les consultations des autorités sur les modes de rémunération des professionnels de la finance, il peut être bon de rappeler aux investisseurs-payeurs de frais financiers ce qu’ils obtiennent en retour. Aux États-Unis, les frais financiers sont tous séparés. Les rendements que l’on voit ne présentent parfois que 25% des frais réellement payés. Il y a trois, quatre couches de frais supplémentaires. Bref, on achète maintenant sa retraite en kit, guide d’assemblage non inclus.

Depuis l’avènement des FNB, le monde de la finance se rapproche de plus en plus du monde de la construction. On est certain qu’il y aura des extras, mais on n’est pas sûr du total. La loi américaine étant ainsi faite, on ne présente que le frais de gestion du fonds ou du produit. À cela s’ajoutent, un frais de maintien annuel et les frais du compte de courtage, les honoraires du conseiller principal et les frais de planification financière et de comptabilité. Ce dernier poste de dépenses est parmi les plus coûteux et les plus négligés par ceux qui vantent les merveilles du système américain. Les éléments de calculs des coûts de base, des gains en capitaux, dividendes et autres distributions engendrés par les transactions se présentent souvent pêle-mêle et le comptable doit y retrouver son latin. Celui-ci n’oubliera pas de refiler à l’investisseur (et non au fonds) la facture finale et SURTOUT l’impôt imputée. Ainsi, un portefeuille de FNB dont les frais de gestion ne sont que de 0,5% peut engendrer annuellement 1,25 à 1,5% de plus.

Au Canada, on a longtemps tout intégré les frais dans un seul ratio, le MER ou RFG en français. Ce ratio est maintenant désuet, car un large pan de l’industrie n’y inclut que ce qu’on veut bien y présenter. Bref on se retrouve avec le modèle de calcul incomplet des Américains et l’ancien modèle canadien tout inclus. On ne peut évidemment plus faire de comparaisons honnêtes.

Émoustillés par les promesses des manchettes des journaux, vous serez tentés vous aussi de tout chambarder votre portefeuille. Prenez une respiration et demandez au vendeur de FNB, de paniers boursiers ou de caisses communes… de vous dévoiler par écrit TOUT ce qu’il vous restera à acquitter comme frais et impôt et QUI fera votre planification financière. Enfin, posez-vous la VRAIE question: avez-vous besoin de vous faire GUIDER ou de CONSOMMER un produit financier de plus?

La quête du plus bas soumissionnaire dans nos travaux publics ne nous a pas très bien réussi. Ne laissons pas l’industrie canadienne des services financiers calquer le modèle. On mérite plus de transparence.

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Par Fabien Major

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